Dialogue fictif n°7 : Roland Barthes et Marguerite Duras

Roland et Marguerite

2008–2018 / Vidéo & Super 8 / 50 min / couleur, sonore

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Joseph Morder jouant Marguerite Duras – photo de tournage, squat d’artistes, Paris, 2007

Nouvelle énonciation de la mort de Roland Barthes sous la forme manifeste d’un travestissement burlesque du cinéma indépendant. Directement inspiré de l’excentricité savante et littéraire de la Renaissance tant prisée par les Humanistes et les poètes baroques qui signalaient leur aptitude au jugement critique en usant d’une rhétorique de la déviance. Son actualisation dans les dialogues fictifs marque notre volonté d’une constante possibilité d’ironie dans l’art. Tourné à l’arrachée au Collège de France, dans les rues et les squats d’artistes parisiens, Roland et Marguerite met en scène au-delà de sa dimension comique les possibilités de continuité de la tradition marginale à l’époque contemporaine. Mais ne serait-il pas temps d’en faire encore autre chose ?

Extrait du film

Scène dite « Recherche de la démarche de Duras par Joseph Morder », dirigé par la Galerie du Cartable

Dialogue fictif N°7 — Roland et Marguerite
La Galerie du Cartable (collectif vidéo)
2008–2018 / tourné en Mini DV, Super 8, i-Super 8, téléphone portable et bra-cam / format 4:3 / couleur, sonore / 50 min

Avec :
Olivier Robin : Roland Barthes
Joseph Morder : Marguerite Duras
Martin : Olivier G, le Gigolo, l’infirmière
Et la voix de David Legrand
Musique originale : Yoann et Davy Bernagoult
Scénario : La Galerie du Cartable
Dialogues : David Legrand
D’après Incidents / Soirées de Paris (textes posthumes de Roland Barthes),
une farce d’un historien de l’art et La Grande Illusion de Jean Renoir
Avec le soutien de la DRAC Centre

Les bandes-annonces

Archives / Journal / Correspondance

Mail de David Legrand à Joseph Morder
30 août 2007 – depuis le Café des Halles, Châteauroux

Cher Joseph,

Je n’ai pas trouvé mieux que de rédiger un journal de tournage pour te passer quelque chose de personnel sur notre film, son sujet, ses heurts, sa façon.

Après cette première partie avec Olivier, nous pensons tourner la deuxième avec toi après le 15 septembre, créneau qui, pour l’instant, prend en compte les disponibilités de chacun et, bien entendu, celle que tu m’avais donnée.

Concernant la durée du tournage, je pense qu’une journée et demie serait suffisante, contrairement aux trois jours que je t’avais annoncés un peu bêtement.

Voici le déroulé envisagé :
– Le matin, à partir de 10h30 : quelques plans de Duras seule, dans ta maison et dans ton quartier. Des instants de ta vie travestie en Duras ou incarnant le personnage.
– L’après-midi : la scène du camion et de l’écrasement, avec Olivier.
– Le soir : la scène de la mort, inspirée de La Grande Illusion, entre De Boeldieu (Pierre Fresnay) et von Rauffenstein (Eric von Stroheim), avec Olivier et peut-être trois Sœurs de la Perpétuelle Indulgence costumées en infirmières militaires.

Je suis en train d’adapter les dialogues pour Barthes, Duras et les infirmières — je te les enverrai très prochainement.

La demi-journée supplémentaire est prévue au cas où un imprévu ralentirait le tournage.

À propos de ta perruque et de ton costume, j’aurais besoin de tes mensurations : tour de tête, taille, poitrine, hanches et pointure.

Peux-tu me proposer une date qui te conviendrait à partir du 17 septembre pour couvrir cette journée et demie ?

Tous les frais liés au tournage seront bien entendu pris en charge.

J’espère que ce journal un peu brut, qui traduit l’esprit du film, te donnera envie.

En attendant ta réponse, depuis le café des Halles à Châteauroux,
d’où je me suis connecté pour t’envoyer ce message,
je commande un berrichon à ta santé.

Tchin !

Ami, David

P.S. : Je te joins aussi la première version du synopsis.

Documents

Photo de tournage de la scène de la mort de Roland Barthes, avec Joseph Morder et Olivier Robin jouant à Marguerite Duras et Roland Barthes – squat d’artistes, Paris, 2007

Affiche du film de la première, réalisée par Rainier Lericolais, présentée au cinéma Apollo, Châteauroux, 2018.

Dialogue fictif nº6 : Oskar Kokoschka et Günter Brus

«Une leçon de peinture»

2012 / vidéo numérique / 13 min.

Novembre 2006, nous transformons l’espace de la galerie Octave Cowbell (Metz) en studio-théâtre pour jouer une action performance mettant en scène à l’intérieur de l’exposition d’une jeune peintre, Hermine Bosquet, une leçon de peinture d’Oscar Kokoschka à Günter Brus, dont le sujet, propose à travers un dialogue grossier :

«L’alliance anti-historique de l’expressionnisme et de l’actionnisme, pour un acte d’extrême culture qui rejoint d’extrême simplicité, afin que l’homme cultivé se retrouve à un autre niveau que l’homme culturel ».

Décembre 2011, nous proposons au groupe de musique expérimentale IF (Michael Barnabé et Vincent-Emmanuel Guitter) de réaliser en direct lors d’une projection publique de la première version montée du film la bande sonore du dialogue fictif.

Cette performance est filmée et intégrée dans le montage final. La leçon de peinture devient le sujet d’une leçon de musique, le dialogue traverse les époques, les genres, les lieux.

Documents

Présentation des Dialogues Fictifs

Une série cinéplastique

9 vidéos d’esthétique-fiction réalisées entre 2004 et 2022

Bande-annonce des Dialogues Fictifs de la galerie du cartable
2004–2022 / vidéo numérique (HD, Hi8, 16 mm) / 1 min

L’œuvre commune d’un être collectif

Depuis 2004, la galerie du cartable écrit et met en scène des dialogues fictifs qui empruntent à l’histoire littéraire une forme particulière, une variante du dialogue ordinaire : le dialogue des morts. Parce qu’elle met en présence des personnages de pays et d’époques éloignés, et parce que toutes les vanités humaines s’anéantissent au moment de la mort, cette forme ouvre un champ d’une grande variété et permet une invention permanente, où l’on peut exprimer sans affectation des idées souvent opposées à celles communément admises.

Nous avons découvert ce genre littéraire à travers Fénelon, à une période où nous cherchions une autre voie que l’exposition pour transmettre une pratique artistique vécue comme une expérimentation de la vie quotidienne, insoumise et incandescente. Nous voulions montrer que cette nécessité de vivre l’impossible n’est rien d’autre que la possibilité, pour de petits groupes, de mener une vie de création permanente.

La création implique bien plus que le seul travail artistique : elle est avant tout la possibilité d’inventer des lieux de liberté pour l’imagination. Dans cette perspective, les Dialogues des morts nous ont offert un cadre idéal pour construire des langages capables de parler de cette possibilité, de ce projet de vie. Un cadre que l’adaptation filmique nous permettait de rendre visible.

Nous avons donc établi une liste de sujets de dialogues permettant de réunir, à chaque fois, deux morts célèbres de l’histoire de l’art ou de la pensée, ayant vécu à des époques différentes ou non, interprétés par des artistes ou des penseurs vivants, sous la forme de conversations filmées. Comme nous ne souhaitions pas que cette parole soit improvisée, il nous est apparu indispensable de l’écrire, afin de fabriquer un parler spécifique. Un style d’énonciation, écrit au plus près du langage des protagonistes et des propos qu’ils ont tenus ou qui leur ont été attribués.

Cette parole, une fois composée, n’est utilisée ni comme accompagnement, ni comme commentaire, mais comme une matière esthétique. Il s’agit de porter le langage de l’art à l’écran.

À cela s’ajoute la volonté, dans les Dialogues Fictifs, de faire entendre des morts qui continuent de penser le présent, par l’intermédiaire des vivants. Les voix des vivants reprennent celles des morts, s’y glissent, mais ramènent toujours leurs paroles au cœur de notre époque.

La fiction vidéographique permet alors de construire un espace de communication inédit entre les anciens, les modernes et les vivants. Elle engendre des récits de création excentriques dans lesquels, par exemple, Luther écrit des chansons pour Madonna, Vinci et Poussin se disputent en faisant leur jogging, Elvis promène Marie-Madeleine en Piaggio, et Le Corbusier fait voyager Dürer sur un tapis volant.

Document

Dialogue fictif N°4 : Marie-Magdeleine et Elvis Presley

Sur le non-désir et les affections du corps humain

D’après « On n’y voit rien » de Daniel Arasse et « Manuel de réforme intérieur, Tractacus devotus de reformacione virium anime » de Gerard Zerbolt de Zutphen

Dialogue fictif N°4 — Sur le non-désir et les affections du corps humain
La galerie du cartable (collectif vidéo)
2004 / vidéo numérique mini DV / 19 min.

Avec :
Marie-Madeleine : Françoise Quardon
Elvis Presley : David Legrand
Le Moine orgiaque transformiste : Frédéric Lignon

Le groupe de rock : Les Mégaphones 
Scénario de la galerie du cartable
Dialogues de David Legrand

Dialogue fictif N°5 : Pierre Paolo Pasolini & Andy Warhol

Andy Warhol : Tu sais Paolo, l’art donne du sens à l’argent, mais l’argent donne du sens à l’art

Pasolini : Pourtant, seule la culture donne une morale à l’argent. La culture est ce que la société attend. Pour moi l’art est négatif. Il est la liberté, il est contre la culture. Un jour un homme a dit  “la culture est le couvercle de wc que l’on met sur la merde.”

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Photogramme extrait du dialogue fictif n°5, « Une visite d’exposition de Pier Paolo Pasolini et Andy Warhol, la galerie du cartable, 2005

Une visite d'exposition

Invitée par l’artiste Michel Aubry lors de l’exposition La Nouvelle Vie quotidienne au FRAC Pays de la Loire, la galerie du cartable transforme la salle en plateau de tournage, installe une salle de projection et investit le musée des beaux-arts afin de mettre en scène Pasolini et Warhol pendant une visite d’exposition, valable pour toutes les expositions.

 » Pratiqué depuis 2004, par la galerie du cartable, (Trio d’artistes composé de Fabrice Cotinat, David Legrand, Henrique Martins Duarte agissant entre leur villes respectives, Châteauroux, Nantes, Bourges) le dialogue fictif dérive d’un genre pédagogique antique, cristallisé à la fin du XVII ème siècle par les Dialogues des morts de Fénelon. Des morts célébres s’y rencontrent pour discuter de leur accords ou leurs désaccords, selon une distribution anachronique ou uchronique qui n’hésite pas à rassembler des anciens et des modernes, historiques et fictifs (…)  » Hélène Meisel

in Le Maître Etalon, Michel Aubry ou comment Faire chanter les avants-gardes exemplaire, les Cahiers de Musée National d’art moderne Printemps 2014

Dialogue fictif n°5 : Pier Paolo Pasolini & Andy Warhol « Une visite d’exposition »
La galerie du cartable (collectif vidéo)
2005 / vidéo numérique HD / 16 min.

Avec:
Fabrice Cotinat : Pasolini et Warhol
David Legrand : la voix de Pasolini
Henrique Martins Duarte : le vidéoporteur
Scénario de la galerie du cartable
Dialogues de David Legrand

Réalisé avec le soutien du FRAC des Pays de la Loire, du Musée des Beaux-Arts de Nantes, de l’École de Musique de Carquefou et du Musée de Châteauroux.