Reconstitution d’un cours humaniste du XVIème siècle

par la voix de Jean-Luc Godard

Écrit et dirigé par David Legrand
Production : Châteauroux-Underground Production
Durée : 33 minutes

Année de production : 2010
Langue : Français
Format : Vidéo Mini DV – 4:3
Genre : Film de recherche artistique
Avec : David Legrand, Philippe Zunino, Michel Baggi, André Breynaert, Gilles Durand, Pierre-Charles Bilien, Pauline Jacquelin, Glen Loarer, Akli Merzouki, Ernesto Sartori, Benjamin Thomas

Et la participation du groupe de recherche « À propos d’une nouvelle école »
École supérieure des beaux-arts de Nantes Métropole

À Propos du film

Reconstitution filmique d’un cours humaniste du XVIème siècle à partir de ses représentations dans les images peintes et gravées de l’époque et des écrits pédagogiques d’artistes ou de penseurs, très florissant à cette période de réforme et d’émancipation de l’individu. Tel que le guide du penseur de Nicolas de Cues (1462), l’Instruction sur la manière de mesurer (1525) d’Albrecht Dürer, les ouvrages sur l’éducation d’Erasme (1511) ou encore son fameux éloge de la folie (1509), à qui il donna la parole pour enseigner sa propre raison. De là surviendra l’événement pédagogique : un âne avec la voix de Jean-luc Godard donne un cours inédit.

Mail adressé à Michel Aubry,
artiste-professeur à l’École des beaux-arts de Nantes

29 janvier 2006

Objet : Notes préparatoires sur les sources pour l’adaptation filmique d’un cours publié – projet Hölderlin / Heidegger.

Cher Michel,

Après avoir effectué de nombreuses recherches pour trouver des cours publiés, j’ai trouvé beaucoup de textes dont la désignation « cours » a été effacée à leur publication, mais qui, en réalité, sont directement issus d’un enseignement — à la manière du corpus aristotélicien, qui avait été rédigé à partir de leçons orales, mais qui n’étaient pas destinées à la publication.

J’ai découvert les textes des philosophes éclectiques du XIXe siècle qu’on qualifiait d’idéologues ou de doctrinaires, alors qu’ils ont marqué le début de l’enseignement public en France. Les plus notables sont Victor Cousin — célèbres furent les cours de M. Cousin — et Jean-François de La Harpe, dont les cours rassemblés constituent le premier manuel de littérature française, ce qui peut être intéressant pour ce qu’on pourrait appeler notre histoire de la transmission.

C’est la somme importante de leurs cours publiés, si importante que cela a même fini par constituer un genre littéraire à part entière. Mais le problème rencontré, qui est commun à tous ces cours publiés, c’est qu’ils sont beaucoup trop longs pour réaliser un travail d’adaptation filmique en trois jours avec des étudiants. Bien entendu, ils constitueront le début d’un matériel que je communiquerai au groupe de recherche.

C’est donc ailleurs, parmi les philosophes allemands universitaires dont la pratique philosophique passe par le cours, que j’ai trouvé une publication de Heidegger : le cours d’introduction à l’ensemble de ses cours sur Hölderlin.

Dans ce texte apparaissent souvent — tant ils sont au cœur de son cours — des extraits de poèmes ou de lettres d’Hölderlin. On s’aperçoit que la démarche de Heidegger, autrement dit la base de sa méditation, est d’entrer en dialogue avec Hölderlin, de l’interroger pour qu’il participe activement au cours, jusqu’à lui créer un espace d’intervention.

Pourquoi ne pas supposer que l’idée d’Heidegger, en invitant le poète à pratiquer son travail d’enseignement avec lui, était de transformer Hölderlin en professeur ? On pourrait ainsi traduire en scénario le cours pour faire apparaître un nouveau personnage : le professeur Hölderlin.

Et puisqu’il est commode, avec des morts, de supposer les situations les plus improbables, cette nouvelle figure enseignante du poète, créée par le philosophe, permettrait de proposer une représentation filmique de sa naissance ou de son apparition au sein du cours.

Si, par exemple, à travers une fiction complètement anachronique, Hölderlin, en allumant un poste de télévision, voyait diffuser le cours filmé de Heidegger sur sa poésie, c’est tout naturellement qu’il se mettrait à lui parler, à dialoguer avec son poste de télévision — et c’est plus naturellement encore qu’il prendrait une télécommande pour suspendre l’émission, la mettre en pause, la commenter, réécouter certains passages.

Le but serait de montrer Hölderlin intervenir dans le cours de Heidegger, exercer son nouveau métier de professeur tout en enseignant la télévision. Bien sûr, cette situation se développerait uniquement en respectant fidèlement le texte original du cours.

Ce cours d’introduction de Heidegger sur la poésie d’Hölderlin deviendra alors le support d’une fiction cinématographique, et le film, un cours fictionnalisé qui proposera, à travers sa mise en scène, une méthode d’enseignement considérée comme un art de la représentation.

Pour les étudiants, un petit groupe — voire deux — imagine et construit la salle de cours de Heidegger et l’espace où Hölderlin reçoit la télévision. Quand ces deux espaces sont prêts, un autre groupe prend en charge la réalisation du film : construction des personnages et mise en scène vidéographique de la situation.

Je crois essentiel que tout travail réalisé avec une école d’art puisse affirmer aussi l’enseignement de l’art comme le lieu d’expérimentation de son histoire, de sa représentation et de sa transmission.

Voilà pour ce projet. Je t’envoie à la suite le texte original du cours en fichier joint.

Maintenant, s’agissant de l’autre projet sur la reconstitution d’un cours humaniste du XVIe siècle, à partir de sa représentation dans les images peintes et gravées de son époque, je t’envoie des documents, images, dès demain.

Amicalement,
David

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